Un des principes actifs du Curcuma longa, les Turmerosaccharides sont réputés pour leur effet anti-inflammatoire. Comment ces molécules agissent-elles sur l’organisme ? Quels sont leurs autres bienfaits ? Comment les prendre ? Ce billet résume les bienfaits santé de ces molécules d’après la science. Les informations qui y sont présentes ne remplacent pas les conseils d’un médecin.
Sommaire
Quand on parle de remède naturel pour soulager l’ostéoarthrite, le terme turmerosaccharides est souvent évoqué dernièrement. Proposées sous divers noms commerciaux sur le marché, ces molécules ne sont en réalité que l’un des nombreux composés actifs du Curcuma longa. Nous entendons souvent parler des curcuminoïdes (pigments responsables de la coloration du curcuma) et de leurs bienfaits, mais très rarement de ces composés, qui pourtant possèdent des propriétés médicinales impressionnantes. Ce dossier révèle les particularités de ces principes actifs ainsi que leurs vertus d’après les scientifiques.
Présentation des turmerosaccharides
Les turmerosaccharides figurent parmi les principes actifs du curcuma longa qui lui confèrent des propriétés anti-inflammatoires et analgésiques. À la différence des curcuminoïdes qui sont des pigments polyphénoliques, ceux-ci sont des polysaccharides bioactifs à caractère hydrosoluble. Ces molécules sont dites bioactives car elles sont capables d’agir et d’intervenir dans le métabolisme d’un organisme vivant, sans être toutefois indispensables à son fonctionnement.
En tant que polysaccharides ou polyosides, ces composés comprennent plusieurs oses ou sucres, liés les uns les autres par des chaînes osidiques. Ils contiennent aussi plusieurs groupes hydroxyles –OH, qui sont fortement polaires. C’est la raison qui explique pourquoi, ils sont très solubles dans l’eau. En effet, l’eau est aussi une molécule polaire ; or deux éléments polaires présentent une grande affinité entre eux et sont très solubles.
Ces polyosides, très abondants dans le règne végétal, sont surtout utilisés comme additifs alimentaires. Les quelques recherches menées, ces dernières années, sur ces molécules ont, cependant, révélé qu’elles possèdent d’intéressantes qualités thérapeutiques et jouent des rôles non négligeables dans les processus biologiques (1). Jusque-là la plupart des études scientifiques effectuées sur le curcuma longa se sont, en effet, surtout concentrés sur les effets anti-inflammatoires et antioxydants de ses curcuminoïdes.
Quels sont les bienfaits santé des turmerosaccharides ?
Ces molécules ont-elles une efficacité contre l’arthrose ?
Le curcuma longa est apprécié en médecine ayurvédique pour sa propriété analgésique, et est souvent recommandée pour apaiser les douleurs articulaires. En se basant sur cette théorie, des scientifiques ont isolé les principes actifs de cette plante médicinale et employé ses extraits de turmerosaccharides chez des groupes de rats développant une arthrose, induite par de l’iodoacétate de monosodium. Une dose de solution saline à 0,9 % de 25 µl ajouté de 0,3 mg de ce composé chimique, injectée par voie intra-articulaire, a pu reproduire chez ces rongeurs les mêmes symptômes de l’arthrose chez l’Homme (douleur articulaire, gonflements, raideur, sensibilité, …).
Pour observer l’action de ces polysaccharides, les chercheurs ont administré différentes doses de ces molécules chez les sujets testés. Les rats de laboratoires ont reçu une seule dose de turmerosaccharides par voie orale, 5 jours après l’injection de l’iodoacétate de monosodium, soit 22,5, 45 ou bien 90 mg/kg. Les symptômes de l’arthrose induite par ce composé chimique ont été ensuite évalués 1, 3, 6 et 24 heures après la prise des extraits de curcuma longa. Les résultats des contrôles réalisés ont montré que les symptômes des sujets ayant reçu des doses élevées de ces polysaccharides bioactifs ont été réduits significativement, de moins de 57 % pour le dosage de 90 mg/kg contre 35 % pour la dose de 45 mg/kg. (2)
Les observateurs ont conclu que ces polysaccharides sont efficaces pour apaiser les symptômes de l’ostéoarthrite ou arthrose chez l’homme, une maladie chronique du cartilage qui peut conduire à la dégradation de ce tissu en cas d’absence de prise en charge adéquate. Ces essais cliniques menés sur des modèles animaux ne nous permettent pas de conclure sur l’effet analgésique de ces molécules, bien que leurs résultats soient encourageants. Il nous faut d’autres études cliniques sur l’homme pour confirmer leur capacité à soulager les symptômes de l’arthrose.
Sont-elles capables d’agir comme un anti-inflammatoire ?
Le curcuma longa est aussi connu pour son action anti-inflammatoire, et souvent recommandé pour soulager les douleurs liées aux maladies inflammatoires des articulations. Dans l’étude suivante, des scientifiques ont cherché à évaluer l’efficacité anti-inflammatoire de ses turmerosaccharides. Pendant 42 jours, 120 patients arthrosiques, dont 37 hommes et 83 femmes ont pris, soit 400 mg de placebo, 500 mg de ces polysaccharides, ou bien 750 mg de sulfate de glucosamine, tous à raison de 2 fois par jour.
Les résultats des examens réalisés au 21ème et 42ème jours du traitement ont montré que les extraits de curcuma longa ont pu diminuer significativement les douleurs de l’arthrose en inhibant l’activité des médiateurs inflammatoires. Les auteurs de cette étude ont aussi souligné l’innocuité de ces molécules (3).
Plus d’essais cliniques de plus grande envergure sont essentiels pour confirmer l’action anti-inflammatoire de ces molécules. Ces observations ont été conduites sur un nombre limité d’individus, ne permettant pas d’obtenir des résultats probants.
Possèdent-elles un effet immunostimulant ?
Quelques publications scientifiques ont aussi rapporté l’effet immunostimulant des polysaccharides bioactifs que contient le curcuma longa. Les auteurs de ces revues ont souligné l’efficacité des turmerosaccharides en tant que traitement adjuvant chez les patients souffrant de cancers.
Dans l’étude suivante, les scientifiques se sont mis à isoler et à identifier chacun des composants bioactifs du curcuma longa, et à évaluer ensuite leurs activités immunomodulatrices sur un échantillon de cellules humaines mises en culture. La méthode d’isolation utilisée a été l’extraction classique hydro-alcoolique.
Pour évaluer l’effet immunostimulant de ces polysaccharides, les chercheurs ont utilisé des doses variables de ceux-ci, allant de 100 à 800 µg/ml, sur les cellules humaines. Ces dernières ont été incubées pendant 72 heures dans une solution de polysaccharides bioactifs, additionnée de composés chimiques, dont du bromure de 3-(4,5-diméthylthiazol-2-yl) -2-5-diphényl-tétrazolium. Cette substance possède un effet cytotoxique vis-à-vis de ces cellules.
Les résultats de cette expérience ont montré qu’à partir de 200 µg/ml, les polysaccharides du curcuma ont pu protéger les cellules de l’effet cytotoxique de ce composé chimique, en stimulant la production des lymphocytes T et l’activité des cellules phagocytaires. Ces deux types de cellule jouent, tous les deux, un important rôle dans la réponse immunitaire de l’organisme. Si les cellules T détruisent les cellules infectées grâce à leur action cytotoxique, les phagocytes ingèrent et détruisent les particules étrangères se trouvant dans leur milieu (4).
Non seulement les preuves scientifiques manquent encore pour confirmer cet effet immunostimulant, mais en plus les quelques essais cliniques menés ont été conduits sur des échantillons de cellules en culture. Nous ne pouvons donc pas conclure sur l’efficacité de ces molécules chez l’homme.
Ont-elles la capacité à protéger le cartilage de la dégradation ?
En plus d’apaiser les douleurs liées aux troubles articulaires, les turmerosaccharides seraient aussi capables de prévenir la dégradation progressive du cartilage, soulignent certaines publications scientifiques. D’après les observateurs, ces molécules peuvent améliorer l’homéostasie des chondrocytes (cellules volumineuses du cartilage).
L’homéostasie cellulaire, rappelons-le au passage, c’est le processus de régulation de la cellule qui lui permet de rester stable et de fonctionner normalement malgré le stress et les variations de son environnement. La dérégulation de ce processus, induite par des médiateurs inflammatoires comme l’interleukine 1 bêta (IL-1β), a conduit à la dégradation progressive du tissu cartilagineux, d’après les chercheurs. On a observé des signes de sénescence des chondrocytes et une baisse importante du taux de collagène et de glycosaminoglycanes (ce sont les éléments des matrices extracellulaires qui protègent les tissus conjonctifs du stress mécanique).
Les auteurs de la publication ont mis en avant que la surexpression des médiateurs inflammatoires a un effet cytotoxique sur les cellules du cartilage. L’ajout de polysaccharides à forte polarité extraits de curcuma longa a permis de protéger les chondrocytes, tout en inhibant l’activité des substances pro-inflammatoires (5). D’autres essais cliniques sur des modèles humains demeurent toutefois nécessaires avant de confirmer cette qualité thérapeutique. Ces expériences ont été en effet menées sur des échantillons de cellules en culture, insuffisantes pour conclure sur quoi que ce soit.
Bien choisir ses turmerosaccharides en gélules
Les turmerosaccharides vendus sur le marché de la phytothérapie sont proposés seuls, ou bien mélangés avec d’autres principes actifs du curcuma longa, dont les curcuminoïdes et les essences volatiles de turmerones. Que le produit soit pur, ou mélangé avec d’autres composés, il faut qu’il présente une concentration élevée en ces polysaccharides actifs pour une meilleure efficacité, d’au moins 10 %.
Les marques fiables n’hésitent pas à mentionner l’origine de leurs produits et la méthode d’extraction qu’ils ont utilisée. Il faut s’assurer que le complément alimentaire est dépourvu de substances chimiques et facile à absorber par l’organisme.
Quelle est la posologie efficace de turmerosaccharides ?
La posologie indiqué pour ce complément alimentaire à effet anti-inflammatoire est de 500 à 1 500 mg par jour, soit l’équivalent de 1 à 3 gélules de 500 mg, le format le plus souvent proposé sur le marché. La durée de traitement est de 15 à 30 jours, variable en fonction de la gravité du trouble articulaire. Mais normalement, en seulement 20 jours les symptômes de l’arthrose de stade non encore avancé disparaissent.
Ce produit est contre-indiqué aux femmes enceintes et à celles qui allaitent. Ceux qui prennent d’autres médicaments doivent signaler leurs médecins avant d’entamer un traitement à base de ces polysaccharides actifs. L’avis d’un spécialiste demeure essentiel pour prévenir les dangers et effets indésirables. Attention, ces dosages sont juste donnés à titre d’information. Veuillez respecter les conseils de votre médecin. Une supervision médicale est impérative pendant le traitement.
Références
(1)Jian-Hua Xie et al. « Progrès dans les polysaccharides bioactifs issus de plantes médicinales ». Phytochimiques diététiques Nutrition et santé, p 60-84, 13 octobre 2015.
(2) Bharati B et al. « Turmerosaccharides bioactifs de l’extrait de Curcuma longa (NR-INF-02): Effet d’amélioration potentiel sur l’arthrose ». Pharmacogn Mag, 2007 13 octobre, p: 623-627.
(3) Mashu K et al. « Sécurité et efficacité de l’extrait de Curcuma longa dans le traitement de l’arthrose douloureuse du genou: Essai randomisé et contrôlé par placebo ». Inflammopharmacology, 2013 Apr; 21 (2): 129-136.
(4) Grace G et al. « Activités immunostimulantes de l’extrait de polysaccharide isolé de Curcuma longa ». Int J Biol Macromol. 2010 oct 1; 47 (3): 342-347.
(5) Chandrasekaran et al. « L’extrait polaire de Curcuma longa protège l’homéostasie du cartilage: mécanisme d’action possible ». Inflammopharmacology, 1-11, 2018.